Rampe d'accès à Super-Besse : destination Lune |
De Super-Besse (de régime)
Une semaine de sprints, de gamelles en tout genre, d'éliminations de prétendants au podium final et à la première arrivée en altitude, paf ! Une imposture qui s'impose à Super-Besse. Rui Costa, ça c'est du champion. Du Lusitanien nourri sous la mère avant d'être élevé au grain. Y en avait tellement sous le capot qu'à son arrivée chez les pros, en 2007, la péninsule a annoncé le grand champion de demain. Avec le paletot de l'équipe Benfica, fallait quand même oser.
Mais le garçon a vite confirmé sur le Tour de l'Avenir ou les 4 jours de Dunkerque, entre autres. On a donc commencé à le prendre au sérieux, d'autant qu'il est plutôt bon rouleur le Rui. Champion du Portugal contre-la-montre en juin 2010, ça vous classe un homme au niveau mondial. En juillet de la même année, on découvre que le garçon a également le sang chaud. Autant que Carlos Barredo avec lequel il rejouera la grande scène du final de Rocky 3 sur le ring de Montargis. Une belle bagarre à revoir en couleurs (ici).
Malheureusement, en octobre 2010, patatras ! Le chrono national avait été couru avec un peu trop de Methylhexanamine dans les urines. C'est ce qu'un contrôle malvenu affirmera. Rui Costa, qui a vite appris les us et coutumes du peloton, s'est défendu : « J'ai mangé un supplément diététique à base d'arginine. » Comme il est très proche de son frère Mario, le cadet a lui aussi présenté une miction un peu trop trouble. Le hasard fait parfois mal les choses.
Au bout du compte, suspendu par la Caisse d'Épargne, son équipe d'alors, Rui Costa a fait parler ses avocats et repris des cours du soir pour apprendre par coeur l'équivalent du Vidal français. L'abnégation est toujours récompensée puisque, miracle, en avril dernier, faute d'une preuve scientifique d'intention de dopage, Rui Costa a été blanchi. Movistar, l'ancienne Caisse d'Épargne faut-il le rappeler, l'a jouée grand seigneur en réintégrant son coureur. Personne n'a rien trouvé à redire à sa présence en Vendée il y a une semaine. Prenez les gens pour des jambons, il en restera toujours quelque chose.
La bonne soupe de maman
Pourquoi en aurait-il été autrement, du reste ? Sur la route de Super-Besse, les suiveurs ont eu la démonstration de la probité du garçon. 189 pitons au programme, la traversée de la Creuse sinistrée et la bagatelle de 183 passés d'abord au milieu de l'échappée du jour puis quasiment seul ou presque sur les premiers reliefs montagneux de ce Tour 2011. Au bout de 186 bornes, Rui Costa a livré son secret : il carbure à la soupe de tortue. Mais pas n'importe laquelle. Tout simplement celle de sa maman que la douce relevait d'une goutte de Porto quand Rui et Mario prenaient place à table.
La recette est bonne. Vinokourov, qui s'y connait quand même un peu en matière de préparation, n'a jamais vu que l'arrière-train de Costa lorsqu'il a entrepris une contre-attaque qui pouvait le mener au maillot jaune. Saleté de soupe portugaise. Il va être temps que les oligarques kazakhs se penchent sur la question et nationalisent les provinces les plus éloignées du Portugal.
Trop heureuse de revoir le Tour, l'Auvergne ne nous pas réservé la seule surprise Costa à l'ombre du Sancy. En plus de la douche froide qui attendait la caravane, un autre costaud du mollet est venu chercher la deuxième place grâce à une mine dont il a le secret. N'était la taille, on pourrait l'appeler Passe-Partout ce Philippe Gilbert qui ne semble étonner personne quand il maîtrise son sujet des classiques ardennaises aux étapes de moyenne montagne en passant par la chasse aux points du maillot vert dans les sprints intermédiaires.
Nos amis belges attendent depuis tellement longtemps le Wallon qui succédera à Eddy Merckx qu'ils ne vont pas faire la fine bouche devant quelques démarrages canons ou cette étonnante puissance de feu que le champion de Belgique n'hésite pas à sortir. Pendant ce temps-là, Kreuziger et Chavanel promènent leur misère en queue de peloton. 20' dans la vue pour le premier ; 11 dans celle de la Machine. Leurs nuits doivent être plus tristes que celles de Raoul.
Les fantômes de Besse
Il en est un, en revanche, qui s'est montré à son avantage, c'est la puce de Pabu, le lutin de Trégueux, j'ai nommé Cyril Gautier. Celui-là, il y a tellement longtemps que mes copains bretons en parlent qu'il fallait bien, un jour ou l'autre, qu'il se signale sur le Tour. C'est fait, mais ce n'est sans doute qu'un début. Il le mérite en tout cas parce que comme disait un suiveur armoricain qui en connaît un bout sur les champions : « Sur un vélo, il n'a pas d'allure, Cyril. Mais ça ne veut pas dire qu'il est mal. »
Et c'est vrai qu'il ne ressemble à rien Gautier sur son vélo. On dirait un gamin qui tente de rester en selle sur un pur-sang à peine débourré. C'est parfois épique. La mort du signe teintée de renaissance du Phénix. Face à Rui Costa, malheureusement, un enfant de Pabu (ce n'est pas une blague, c'est dans le 2-2!) ne pouvait pas vraiment rivaliser. Allez Cyril, c'est rien. On se reverra bientôt.
C'est qu'il est temps de quitter Super-Besse la pluvieuse. Cette première journée en altitude, c'est bénéfique pour les globules de Raoul, mais la station reine du pays des volcans, ce n’est pas le genre de coin où l'on a envie de rester trop longtemps. Ça fiche même sacrément la trouille par endroits.
Les gens du pays l'accordent, quelques fantômes fréquentent les environs. Je crois avoir vu les environs en question. C'était dans le village de Besse. S'il n'y avait eu ce panneau « Paroisse de Sainte-Marie-des-Lacs et des Couzes », on aurait volontiers pris la bâtisse en question pour une maison hantée.
Il m'a d'ailleurs semblé apercevoir une ombre vêtue d'un maillot Saunier-Duval passer devant l'entrebâillement d'une fenêtre. Mon compagnon de route, lui, est certain d'avoir lu le nom de Ricco gravé dans la pierre. Faudra que je demande à Rui Costa ce qu'il a cru voir en passant sous la ligne. Le malin, sans doute. Sinon pourquoi se signer avant de lever les bras au ciel ?
Le son du jour, spéciale dédicace à toi, Rui
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire